Kiev lâche la Crimée mais s'accroche à l'Est

Un manifestant tend le poing au passage d'un hélicoptère à Slaviansk
Un manifestant tend le poing au passage d'un hélicoptère à Slaviansk © Reuters
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L'Ukraine lance une opération de grande envergure pour garder la main sur ses régions orientales alors qu’elle a laissé filer la Crimée.

L’ANALYSE. Kiev ne semble pas prête à laisser les régions de l’Est lui échapper. Lundi, l’assaut militaire a été lancé pour déloger les insurgés pro-russes de la région de Donbass, aux confins orientaux du pays. Et pourtant, il y a moins d’un mois, Kiev ne s’était pas battue pour garder la Crimée dans son giron et avait laissé les habitants organiser leur référendum de rattachement à la Russie.

Soutenir la majorité des pro-Ukraine. La grande différence entre la Crimée et l’est de l’Ukraine reste la proportion de la population qui soutient la Russie.  Les russophones ne sont pas majoritaires dans la région de Donbass, contrairement à la Crimée où ils représentent 60% de la population. Le président ukrainien par intérim, Olexandre Tourtchinov, est d’ailleurs certain du soutien de la majorité de la population au régime central de Kiev. Il a déclaré "ne pas être contre" un référendum dans la région, qui pourrait se tenir à la fin du mois de mai, au même moment que les présidentielles. "Je suis certain que la majorité des Ukrainiens se prononcerait pour une Ukraine indivisible, indépendante, démocratique et unie", a-t-il affirmé.

Garder ses industries. Les régions de l'Est concentrent une grande partie de la force industrielle de l'Ukraine et offre un débouché vers la Russie, un des principaux partenaires économiques  de l'Ukraine, même si les relations sont des plus tendues depuis quelques mois. Pour autant, rappelle pour Europe 1 la maître de conférences à l'Inalco Irina Dmytrychyn, ces régions sont également sous perfusion financière de Kiev. Elles coûtent plus qu'elles ne rapportent à l'Etat central, souligne la chercheuse spécialiste de l'Ukraine.

Eviter l’effet domino. "Les autorités ukrainiennes ont été prises de cours, en Crimée", explique a posteriori la chercheuse. Entre temps, les forces militaires et stratégiques ukrainiennes ont eu le temps de se préparer à l’éventualité d’une invasion russe dans l’Est du pays et ont également pu observer la stratégie de Moscou en Crimée. Pas question donc cette fois de se laisser surprendre. De plus, il manque un avantage certain à la Russie. En Crimée, ses troupes étaient déjà présentes, notamment dans la base de Sébastopol. Alors que Moscou a dû bouger des troupes à la frontière avec l’Ukraine, pour la suite des événements.

En laissant filer la Crimée, l’Ukraine avait déjà joué gros, risquant de créer un précédent dans son histoire. Car des populations russophones et russophiles peuplent toute l’Ukraine, et pas uniquement la presqu’île criméenne. "L’effet domino n’est pas acceptable", explique Irina Dmytrychyn, maître de conférences à l’Inalco et responsable de la section ukrainienne de l’institut de recherches. Béatrice Giblin, chercheuse en géopolitique, ajoute de son côté sur Atlantico : "Seul un rapport de force très défavorable l’a contrainte à lâcher la Crimée." Et ce ne sera pas le cas aujourd’hui.

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