"Tabac Info", du brouillage sur la ligne

L'Office français de prévention du tabagisme n'apprécie pas le choix de la société Direct Medica pour gérer la ligne Tabac Info Service.
L'Office français de prévention du tabagisme n'apprécie pas le choix de la société Direct Medica pour gérer la ligne Tabac Info Service. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
Ce service d'aide à l'arrêt du tabac va être géré par une société qui ne fait pas l'unanimité.

Avant la Journée mondiale sans tabac, qui aura lieu jeudi, l'affaire fait tache. Une polémique est en train de naître autour de l'attribution à la société Direct Medica de Tabac Info Service, le 39 89, service téléphonique destiné à aider les fumeurs à arrêter. Le problème : cette entreprise privée est accusée d'être très proche des laboratoires pharmaceutiques.

Depuis plus de dix ans, le service téléphonique, créé en 1998 par l'Inpes (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé), était confié à l'Office français de prévention du tabagisme (OFT), une structure associative. Assorti d'un site Internet, Tabac Info Service propose aux fumeurs un suivi et des conseils de tabacologues ou des téléconseillers.

"Conflit d'intérêt manifeste"

Mais le contrat de l'OFT arrivant à son terme, l'Inpes a lancé un appel d'offres qui a été remporté par la société privée Direct Medica. La décision a provoqué la colère de l'OFT, qui a déposé un recours en référé devant le tribunal administratif de Montreuil. Vendredi dernier, le juge a statué en sa défaveur et l'OFT sera donc bien remplacé par Direct Medica dès le 17 juillet.

Pour l'association, il s'agit pourtant d'un "conflit d'intérêts manifeste". D'après l'OFT, Direct Medica a en effet pour "activité principale et d'origine" le "commerce pour le compte de l'industrie du médicament" et n'a "aucune expérience connue ou reconnue en matière de sevrage tabagique".

Substituts nicotiniques

Sur son site, Direct Medica se "vante ouvertement" de participer à la "vente optimisée" aux pharmacies", dénonce l'OFT, relevant que "parmi ses références", Direct Medica cite "quatre des cinq laboratoires qui fabriquent les substituts nicotiniques et les traitements à l'arrêt".

"Nous avons là tous les ingrédients d'un nouveau scandale politico-sanitaire", s'insurge l'association, qui s'interroge : "Comment peut-on accepter que l'Etat puisse attribuer un marché public - la ligne nationale Tabac Info Service - à une société privée spécialisée dans la vente directe aux officines pharmaceutiques des produits d'arrêt du tabac de 80% des laboratoires ?".

La directrice générale de Direct Medica, Sophie Kerob, est aussi mise en cause par l'OFT, qui l'accuse de s'être "introduite de manière déloyale au sein du conseil d'administration de l'association". Elle aurait "pillé toutes les données techniques et financières", permettant à Direct Medica de remporter l'appel d'offres.

Direct Medica se dit "diffamée"

L'entreprise, elle, s'estime "diffamée". "Notre société est le leader français des centres d'appel dédiés à la santé et gère de multiples missions pour les hôpitaux, les mutuelles, les pouvoirs publics et les industriels de la santé", assure Sophie Kerob. Quant aux accusations la visant personnellement, elles sont "scandaleuses et relèvent de la calomnie", estime-t-elle.

De son côté, l'Inpes défend son choix et assure que les critiques de l'OFT "relèvent davantage du procès d'intention", rapportent Les Inrocks. L'Institut affirme également qu'outre les aspects financiers, "l'offre retenue était également meilleure que celle de l'OFT sur deux critères d'ordre technique".