Suicide des séniors : une "mallette" pour briser le tabou

Le suicide des personnes âgées - un phénomène encore largement tabou -, peut être combattu, veut croire le gouvernement, qui va déployer auprès des structures d'aide à domicile un outil visant à détecter les premiers signes de dépression.
Le suicide des personnes âgées - un phénomène encore largement tabou -, peut être combattu, veut croire le gouvernement, qui va déployer auprès des structures d'aide à domicile un outil visant à détecter les premiers signes de dépression. © Max PPP
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Alors que le phénomène touche chaque année 3.000 personnes de plus de 65 ans, l'exécutif a présenté son "outil".

L'outil. Comment endiguer le suicide chez les personnes âgées ? Alors que le phénomène représente 30% du nombre total de suicides en France, Michel Delaunay, la ministre déléguée aux Personnes âgées et à l'Autonomie, a présenté jeudi un "outil" visant à détecter les premiers signes de dépression. "Mal connu, peu interprété, insuffisamment pris en compte dans une société qui se concentre beaucoup sur sa jeunesse, le suicide des âgés est devenu un phénomène trop important pour être ignoré", a regretté jeudi la ministre dans un communiqué.

>>> Zoom sur un instrument censé lutter contre ce phénomène "trop important pour être ignoré".

Objectif numéro un : repérer la dépression. Concrètement, la ministre a présenté jeudi une mallette, baptisée "Mobiqual". Elle contient une batterie de brochures, livres et DVD, et sera envoyée en 36.000 exemplaires pour initier l'ensemble des professionnels d'aides aux personnes âgées (de l'aide à domicile au directeur d'établissement) sur les signes avant-coureurs d'une dépression. Des signes qui ne sautent pas toujours aux yeux. "Les idées suicidaires ne sont pas toujours exprimées spontanément et doivent donc être systématiquement recherchées", explique le ministère dans un communiqué. Et de poursuivre : "le désir de mort peut se traduire, non pas en mots, mais dans l'humeur ou les comportements de la personne : refus de soins, de s’alimenter, repli sur soi…"

Objectif numéro deux : briser un "tabou". L'enjeu est de taille. En 2010, en France, sur 10.000 cas de suicides, il y en a eu environ 3.000 chez les plus de 65 ans, alors que les personnes âgées ne représentent que 20% de la population totale. Et les plus de 85 ans seraient même quatre fois plus nombreux à se suicider que la moyenne de la population. Le suicide est même l'une des trois principales causes de décès des personnes âgées, après le cancer et les maladies cardiovasculaires, selon le ministère. Il s'agit donc, avant tout, de parler de ce sujet, et de sensibiliser professionnels et familles. "A l'inverse du suicide de l'adolescent, le suicide de la personne âgée provoque peu d'émoi médiatique. C'est un phénomène constamment sous-évalué et banalisé, voire tabou", a souligné Michèle Delaunay jeudi pour défendre sa "mallette".

L'objectif numéro trois : alerter sur un profil bien à part. Ces statistiques et la nécessité de briser le tabou sont renforcées par un autre (dramatique) phénomène : la première tentative d'un sénior suicidaire est généralement la bonne. Les suicides ont lieu pour 70% d’entre eux à domicile. Et "le suicidant âgé est souvent très déterminé", note le ministère. "Le passage à l’acte est généralement préparé avec soin. Les moyens utilisés sont volontiers radicaux (pendaison, noyade, défenestration, armes à feu, etc.)", poursuivent les services de Michèle Delaunay. Autres informations que les professionnels devront avoir en tête pour se tenir en alerte : les personnes sont souvent des hommes (2/3), certaines régions sont plus touchées que d'autres (Bretagne, Picardie etc.) et certains moment de l'année ont plus d'influence que d'autres (fêtes de fin d'année, vacances etc.).