"Salut poupée" ou le sexisme ordinaire au travail

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Alexis Toulon avec AFP
Les femmes sont confrontées à des discriminations quotidiennes sur leur lieu de travail. Une situation intenable.

L’égalité homme femme est un combat de longue haleine. Discriminations salariales, plafond de verre, la différence de sexe est un problème dans la carrière professionnelle des femmes. Sans compter qu’au quotidien, les propos et actes sexistes se sont confortablement installés sur les lieux de travail, comme le montre une étude  de l'institut de sondage LH2 pour le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) publiée mardi. Florilège.

Le sexisme, un ressenti féminin nié par l’homme. Huit femmes sur dix (80%) considèrent que "les femmes sont régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes" dans le monde du travail en France, d'après l'étude menée principalement auprès de cadres. Par contre, à peine 56% des hommes en ont conscience… et 13% d’entre eux estiment que ce sexisme est même normal car il fait « partie du jeu des relations » homme/femme. Triste constat : 13% des femmes pensent la même chose.

Une carrière pénalisée. 54% des femmes estiment avoir rencontré un frein professionnel en raison de leur sexe. Au quotidien, cela se traduit par une absence d'augmentation ou de prime (36%), de promotion (35%), d'attribution de mission (31%), etc. Sans compter les situations où elles servent à décharger les hommes des tâches ingrates : 46% disent avoir déjà eu le sentiment d’être chargée de tâches dévalorisantes ou sous-estimées par rapport à leurs compétences, de manquer d'autonomie...

Un bon mot bien cliché. C’est bien connu, une femme avec des responsabilités, n’est pas une femme comme les autres pour les hommes. La preuve : 81% des femmes et 59% des hommes ont déjà entendu dans leur environnement professionnel des jugements comme "elle est hystérique" ou "elle est pire qu'un homme" à propos de femmes qui exercent des responsabilités.

Une femme reste une poupée biologique. Forcément si une femme demande à un homme de répéter une explication (probablement bancale), c’est que son intellect est insuffisant.  Heureusement, le mâle pourra pédagogiquement utiliser le "elle fait sa blonde" ou "ne fais pas ta blonde" pour régler le problème. Ce type de phrases a été entendu par 69% des femmes interrogées. Si elle avait la mauvaise idée de signaler avec énervement que ce comportement n’est pas supportable et discriminatoire, l’homme pourrait répondre en fin analyste qu’"elle est de mauvaise humeur car elle doit avoir ses règles". En tout cas 59% des femmes ont déjà entendu cette phrase.

En bon paternaliste phallocrate, l’homme donne des surnoms. "Ma cocotte", "ma puce", "ma petite" ... Une femme interrogée sur deux (49%) affirme qu'un homme l'a déjà interpellée en utilisant un surnom sexiste au travail, et 38% des hommes affirment en avoir été témoins.

Un sexisme lourd de conséquence. L’homme est sûr de lui et, de toute façon, dans son bon droit. De toute façon ce n’est pas méchant… Malgré cette (piètre) barrière de défense, le sexisme quotidien peut "modifier le comportement des salariés" (93%), avoir "un impact sur la confiance en soi" (92%) et déstabiliser "le travail de ceux qui les subissent" (92%). Bref un comportement réactionnaire qui abêtit l’homme et pénalise l’entreprise. Peut être que ces arguments suffiront à faire changer les mentalités si l’égalitarisme n’arrive pas à trouver le chemin du cerveau masculin. 

L'étude a été réalisée à partir de deux enquêtes: un sondage national mené par internet du 12 au 18 septembre auprès d'un échantillon représentatif de 1.000 cadres (39% de femmes et 61% d'hommes) travaillant au sein d'établissements de 250 salariés et plus; une consultation en ligne réalisée du 24 septembre au 12 novembre auprès de 14.651 salariés (92% de cadres, 55% de femmes et 45% d'hommes) de neuf entreprises françaises (LVMH, Orange, SNCF, Air France, Radio France, France Télévisions, RATP, GDF Suez, La Poste).