Police : des fichiers toujours illégaux

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avec Matthieu Bock , modifié à
Un rapport parlementaire montre que la moitié de ces documents n’ont pas de base légale.

Suite à une première polémique sur le fichier Stic (Système de Traitement des Infractions Constatées), regorgeant d’erreurs et d’informations périmées, le gouvernement avait promis début 2009 de revoir de fond en comble le système de fichage de la police et de la gendarmerie.

Mais près de trois ans plus tard, le rapport parlementaire réalisé par la commission des lois constitutionnelles est sceptique. "La révolution n’a pas eu lieu", regrettent ses deux auteurs, les députés Delphine Batho (PS) et Jacques Alain Bénisti (UMP). Un chiffre résume les progrès qu’il reste à faire : près de la moitié des fiches policières n’ont aucune base légale.

Des informations parfois récoltées en toute illégalité

"Le cadre juridique des fichiers de police est toujours porteur d'ambiguïtés qui sont susceptibles de porter atteinte aux droits et libertés de chacun", regrettent les deux auteurs de ce rapport, alors qu’un précédent rapport, datant de 2009, préconisait déjà de clarifier le cadre juridique entourant les fichiers de police.

Parmi les fichiers actuellement utilisés, 45% d'entre eux n'ont pas de base légale, n'ayant "fait l'objet ni d'une déclaration à la Cnil, ni d'un texte législatif ou réglementaire", pointe le rapport, contre 27% en mars 2009.

"Il est évident que les policiers et les gendarmes ont besoin de ce type d'outil. Mais on aurait souhaité que, lorsqu'il est nécessaire de créer un fichier de police, il y ait un encadrement par la loi", a décrypté Delphine Batho sur Europe 1, avant d'ajouter : "ce n'est pas la solution qui a été retenue par le gouvernement".

D’avantage de fichiers, plus d’individus concernés

Le rapport pointe également la "croissance continue" du nombre de personnes inscrites dans des fichiers de police. Les individus recensés dans le Stic sont ainsi passés de 3,96 à 6,5 millions. Le fichier national des empreintes génétiques (FNAEG) est, lui, passé de 806.356 profils à 1,76 million en novembre 2011.

Outre le nombre de citoyens concernés, le nombre de fichiers a, lui aussi, progressé. Le rapport a recensé 80 fichiers fin 2011, contre 58 en mars 2009. Pour les rapporteurs, cette augmentation est "principalement imputable à la découverte de fichiers qui existaient déjà à cette date, mais dont l'existence n'avait pas été portée" à leur connaissance en 2009, malgré leurs demandes.

Néanmoins, policiers et gendarmes commencent à intégrer de bonnes pratiques, estime le rapport, qui souligne "une prise de conscience". "Les choses évoluent, mais lentement, très lentement", a résumé Delphine Batho.