Les héritiers de Renault demandent réparation

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avec agences , modifié à
Ils remettent en cause la nationalisation de l'entreprise en 1945 et veulent des indemnités.

Les huit petits-enfants de Louis Renault, l'un des fondateurs du groupe automobile du même nom, n'abandonnent pas leur travail de réhabilitation de la mémoire de leur aïeul. Ils viennent de déposer une assignation pour contester la légalité de la nationalisation de Renault en 194. Et obtenir une indemnisation au titre du préjudice moral causé par cette sanction.

L'attitude controversée de Renault pendant la guerre

Le 16 janvier 1945, le gouvernement provisoire de la République adoptait une ordonnance qui dépossédait Louis Renault de ses parts dans l'entreprise et la transformait en une Régie nationale. Une décision motivée par les accusations de collaboration qui pesaient sur Louis Renault : si le fameux épisode des taxis de la Marne durant la Première Guerre mondiale avait contribué à la popularité et à l'essor du constructeur, son attitude durant l'Occupation fut plus controversée.

Placée en 1940 sous contrôle allemand, Renault avait fabriqué du matériel pour la Wehrmacht. A la libération de Paris, en septembre 1944, Louis Renault était emprisonné à Fresnes. Il était mort en détention, sans avoir été jugé, et n'avait donc pas vécu cette sanction.

Une ordonnance contraire au droit de propriété

Pour les héritiers de Renault, "l'ordonnance de confiscation des biens est contraire aux principes fondamentaux du droit de la propriété", qui figurent dans la déclaration universelle des Droits de l'Homme, indique leur avocat, Me Thierry Lévy. L'instauration de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) en mars 2010, leur permet désormais de contester devant le juge une disposition législative.

Les héritiers avaient déjà tenté de faire valoir leurs droits en 1959, mais le Conseil d'Etat avait alors estimé que l'ordonnance de 1945 ne pouvait être remise en cause ni par un juge administratif ni par un juge judiciaire. Les petits-enfants de Louis Renault comptent s'appuyer sur des archives de Pierre-Henri Teitgen, alors ministre de la Justice. Il mettait en garde contre le droit de confiscation des biens après le décès d'une personne poursuivie pour intelligence avec l'ennemi, qui revenait, selon lui, à sanctionner les héritiers.

Un expert pour évaluer le préjudice

Me Thierry Lévy considère donc aujourd'hui que l'ordonnance et ses mesures d'exécution constituent une "voie de fait" puisque la confiscation, qui est une sanction pénale, ne pouvait être prononcée qu'après un jugement de condamnation définitif. Dans son assignation, l'avocat demande la désignation d'un ou de plusieurs experts pour évaluer dans un délai de quatre mois le préjudice matériel et économique des héritiers.