Les faux sites d'infos de militants anti-IVG

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et Noémie Schulz , modifié à
ENQUÊTE E1 - Les sites des anti-avortement ressemblent à s'y méprendre à des pages officielles.

L'info. Le tribunal correctionnel de Paris doit rendre lundi son jugement dans l'affaire Xavier Dor, ce militant anti-IVG qui était allé prier dans un planning familial et s'était adressé aux patientes pour les convaincre de renoncer. Dans le même temps, le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes arrive au Sénat en première lecture. La sénatrice socialiste de l'Oise Laurence Rossignol a déposé un amendement au texte pour élargir le délit d'entrave à l'IVG : elle prévoit de l'étendre "à l'accès à l'information à l'IVG". Europe 1 a enquêté sur les nouvelles méthodes d'action des militants contre l'avortement.

Des sites qui ont l'air officiel. Comme de nombreuses femmes chaque année, Juliette est tombée enceinte et a décidé de ne pas garder le bébé. Après avoir fait une recherche sur Internet, cette enseignante de 30 ans tombe  sur un site d'information, qui a tout l'air d'être officiel. Sur la page d'accueil, le "Centre national d'écoute anonyme et gratuit" propose un numéro vert.

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"Vous pourriez être une bonne mère". Au bout du fil, Juliette s'entretient avec une écoutante. Mais le discours de cette dernière va beaucoup la choquer. "C'est une dame d'une cinquantaine d'années qui me répond, d'une voix très douce, très calme. Et là s'entame une conversation très libre, de femme à femme. Mais sans trop le savoir, elle vous emmène vers une autre voie en vous demandant 'c'est vraiment ce que vous souhaitez, parce que je sens en vous de la force, j'ai le sentiment que vous pourriez être une bonne mère'. Et quand je lui dis que c'est un accident et lui demande ce que je pourrai dire à l'enfant, elle me répond 'que c'est un enfant de l'amour'", raconte ainsi Juliette au micro d'Europe 1.

A la fin de la conversation, l'interlocutrice de Juliette lui propose de la rappeler. Elle lui assure même qu'elle n'est pas prête et lui conseille d'annuler son rendez-vous chez son gynécologue. Finalement, l'enseignante est tout de même allée au bout de son choix.

"Il y a des risques". Europe 1 a appelé l'une de ces associations en se faisant passer pour une jeune femme désireuse d'avorter. Là encore, l'interlocutrice a utilisé des arguments chocs. "Ce n'est pas anodin l'IVG. On n'est jamais pareil avant et après une IVG. Vous pensez avoir des enfants plus tard ? Parce qu'il y a des risques. Par exemple, Patricia Kaas a fait plusieurs IVG, elle n'a jamais pu avoir d'enfant. On est obligé de vous dire que ce n'est pas sans risque, soit de fausse couche, soit de placenta praevia, soit de prématuré et parfois la stérilité", a ainsi alarmé la conseillère téléphonique.

Des "pro-life" à l'autre bout du fil. Du côté des responsables de ces sites, on assure proposer simplement une écoute, difficile à trouver, selon eux, auprès des centres comme le planning familial. "Nous sommes là, sur le terrain, pour aider les femmes. De toute façon, l'avortement est un droit. Et nous ne faisons qu'aider, informer, soutenir - c'est exactement ce que demandait Simone Veil - pour que les femmes aient tous les éléments pour faire leur choix", assure l'une d'elles sur Europe 1. Hors micro, le responsable d'un site reconnaît pourtant que plusieurs écoutants font partie du mouvement Alliance Vita, un mouvement ouvertement pro-vie.

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Le gouvernement cherche donc à neutraliser ces sites. A la fin du mois, une plate-forme officielle avec toutes les informations sur l'avortement doit notamment être créée.