Les classements des lycées, du toc ?

Soucieux du sort de leurs enfants, les parents suivent avec attention les classements des lycéens. Mais sont-ils vraiment pertinents ?
Soucieux du sort de leurs enfants, les parents suivent avec attention les classements des lycéens. Mais sont-ils vraiment pertinents ? © MAXPPP
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avec Noémie Schulz , modifié à
ENQUETE - Scrutés par les parents, leur pertinence est souvent remise en cause.

L'Education nationale publie mercredi son traditionnel indicateur de résultats des lycées. Le ministère ajoute à chaque fois une mise en garde centrale : il ne s’agit que d’indicateurs et non d’un classement. Pourtant, à partir de ces résultats, la plupart des journaux réalisent un palmarès des meilleurs lycées de France. Comment ces classements sont-ils fabriqués ? Et surtout, sont-ils pertinents ? Europe 1 s’est penché sur la question.

Des critères identiques…

Pour classer les lycées, les journalistes s’appuient sur la matière première fournie par le ministère, les indicateurs de résultats des lycées. Il s’agit avant tout du taux de réussite au bac, un indicateur central mais à prendre avec précaution : un lycée peut avoir 98% de réussite à l'examen tout simplement parce qu'il sélectionne les élèves.

Un deuxième indicateur doit donc être pris en compte, le taux d'accès des élèves au bac. Ce chiffre indique si un lycée accompagne ses élèves pendant les trois années ou s'il s'en débarrasse en cours de route pour ne garder que les meilleurs. Les classements prennent enfin en compte un troisième indicateur, la capacité à faire progresser les élèves.

…mais des classements différents

Si un lecteur décide d’acheter plusieurs magazines pour comparer les classements, il risque d’être surpris : malgré des indicateurs identiques, les palmarès sont rarement les mêmes. Et pour cause : le ministère se refusant à dresser un classement, chaque magazine utilise les critères de manière différente, si bien que le lycée numéro 1 pour le magazine L'Etudiant n'est pas le même que celui du Figaro.

Mais ce que dit surtout le ministère, c'est que cela n'a pas de sens de comparer les établissements entre eux : un lycée qui a un très bon taux de réussite au bac n'est pas forcément le meilleur lycée pour votre enfant.

"Il ne faut pas s’arrêter à ce classement"

Proviseur du lycée Turgot à Paris, Thérèse Delobier se retrouve régulièrement dans le dernier tiers des lycées parisiens. Pourtant, regrette-elle, des critères tout aussi importants ne sont pas pris en compte : le bien-être des élèves dans le lycée ou encore le lien avec les familles.

"Un chiffre et un classement ne donnent pas forcément la réalité de tous les éléments de la vie d’un établissement. Que peut-il apporter de déterminant dans la construction d’un jeune ? La remise par exemple de bulletins trimestriels en main propre à l’ensemble des familles, c’est aussi un moment de dialogue", souligne-t-elle.

C’est pourquoi Thérèse Delobier le martèle : "il ne faut pas s’arrêter à ce classement parce que le dynamisme des équipes pédagogiques, les dispositifs mis en place d’aide et d’accompagnement font que le traitement individuel de l’élève au lycée Turgot est bien au-dessus de cette image-là".

Les lycées classés parce qu’ils ne se valent pas

Les parents d’élèves ne doivent donc pas suivre à la lettre ces classements et le ministère de l'Education lui-même demande chaque année aux médias d'arrêter de faire des classements. Pourtant, chaque année à la même saison, presque tous les journaux font leur classement, désormais aussi consultables sur l’Internet.

"Si l’Education nationale fournissait les mêmes choses à tous les enfants de ce pays, cela se saurait", se justifie Emmanuel Davidenkoff, le directeur du journal l'Etudiant. "Ce n’est pas le cas, l’Education nationale insiste elle-même sur la notion d’autonomie des  établissements donc ce ne sont pas les médias qui se sont engouffrés dans une brèche en disant ‘il y a concurrence entre les établissements’,  les établissements se sont eux-mêmes mis en concurrence", rappelle-t-il.

"Si l’Education nationale était capable d’avoir une offre égale sur l’ensemble du territoire, on ne s’amuserait pas à offrir des classements", conclut Emmanuel Davidenkoff. Que les parents d’élèves s’y fient ou pas, une certitude demeure : c'est maintenant qu'il faut se renseigner sur les lycées car les demandes d'affectation pour l'entrée en seconde se font au mois de juin.