Le blanchiment de fraude fiscale, c’est quoi ?

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Frédéric Frangeul , modifié à
ZOOM - Une information judiciaire a été ouverte mardi, poussant Jérôme Cahuzac à la démission.

Trois mois après les révélations du site Mediapart, une information judiciaire a été ouverte mardi pour enquêter sur l’existence éventuelle d’un compte bancaire à l’étranger de Jérôme Cahuzac, avec des soupçons de "blanchiment de fraude fiscale".  Niant ces accusations, le ministre du Budget a malgré tout été contraint de démissionner mardi pour se consacrer à sa défense.  Europe1.fr vous dit tout.

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Sur quoi porte l’enquête ? Dans l’affaire Jérôme Cahuzac, l’ex-ministre est soupçonné d’avoir détenu à l’étranger un compte bancaire non déclaré. Un enregistrement révélé par le site Mediapart et authentifié par une expertise de la police scientifique, dans lequel Jérôme Cahuzac reconnaît avoir détenu un compte dans la banque suisse UBS, a fait éclater l’affaire en décembre dernier. Le compte bancaire en question, toujours selon le site d’investigation, aurait été fermé en 2010 pour être transféré à Singapour. Ce compte a-t-il réellement existé ? C’est ce que les enquêteurs vont tenter de déterminer.

Qu’est-ce qui caractérise le "blanchiment de fraude fiscale" ? Concrètement, "le blanchiment de fraude fiscale" consiste à réinjecter dans le circuit économique de l’argent dissimulé aux services fiscaux.  "Ouvrir un compte non déclaré à l’étranger pour y placer de l’argent provenant de fraude fiscale, avant  de s’en servir pour acheter des biens est caractéristique du blanchiment de fraude fiscale", résume l’avocat fiscaliste Me Marc Bornhauser, interrogé par Europe1.fr.

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Pourquoi pas une enquête pour "fraude fiscale" ?  Pour qu’il y ait "blanchiment de fraude fiscale", il faut au préalable qu’il y ait fraude fiscale. "Or, en France, c’est la commission des infractions fiscales, placées sous la tutelle du ministère du Budget, qui décide d’engager ou non des poursuites lors de soupçons de fraudes fiscales", observe l’avocat fiscaliste Me Jean Hamet. Jérôme Cahuzac étant ministre du Budget, ladite commission risquait de se trouver en posture délicate. En optant pour le chef de "blanchiment de fraude fiscale", le parquet a pu vouloir éviter cet écueil et garder les mains libres pour enquêter à sa guise.

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Que risque Jérôme Cahuzac ? L’article 324-1 du Code pénal prévoit des peines de 375.000 euros d’amende et jusqu’à cinq ans d’emprisonnement pour des faits de blanchiment de fraude fiscale. C’est moins que pour la fraude fiscale en tant que telle, qui elle, peut valoir à son auteur jusqu’à sept ans de prison et un million d’euros d’amende.

Et la prescription dans tout ça ? Dans le cas d’une suspicion de fraude fiscale, le délai de prescription est généralement de trois ans. Ce qui laisser planer la possibilité d’une éventuelle prescription des faits dans l’affaire Cahuzac. "Concernant les faits de blanchiment de fraude fiscale, le délai de prescription, qui s’élève lui aussi à trois ans, ne démarre qu’au moment de la découverte des faits", souligne Me Marc Bornhauser. L’ouverture d’une information judiciaire sur cette dénomination permet donc à la justice d’éviter toute annulation des poursuites pour cette raison.

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Et maintenant ? Suite à l’ouverture de l’information judiciaire, des commissions rogatoires vont être menées en Suisse et à Singapour notamment, pour établir si Jérôme Cahuzac a détenu un compte à l’étranger pour y placer le fruit d’une éventuelle évasion fiscale. "Cela pourrait aller très vite", estime Me Marc Bornhauser.