L'immunité parlementaire de Serge Dassault levée... et après ?

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avec AFP , modifié à
JUSTICE - Plusieurs enquêteurs visent l'ex-maire. Il pourrait être placé en garde à vue pour des achats présumés de votes à Corbeil-Essonnes.

Abus de biens sociaux, corruption, blanchiment et achat de votes… Voilà autant de soupçons qui pèsent sur Serge Dassault et pour lesquels il pourrait à présent être entendu. Après s'être opposés à deux reprises à la levée d'immunité de l'ancien maire UMP de Corbeil-Essonnes, les sénateurs viennent finalement de changer leur fusil d'épaule. Une décision - demandée par Serge Dassault - qui permettra aux juges enquêtant sur les achats présumés de votes à Corbeil-Essonnes d'interroger l'industriel sous le régime de la garde à vue. Europe 1.fr vous résume les différentes enquêtes qui visent l'industriel. Toutes ces investigations sont en lien avec la mairie de Corbeil-Essonnes, que Serge Dassault a dirigée entre 1995 et 2009.

#UNE ENQUÊTE POUR TENTATIVE D'ASSASSINAT

Tout commence, dans la soirée du 29 janvier 2013, Rachid T. est pris dans un guet-apens au volant de sa voiture à Corbeil-Essonnes. Durant l'attaque, il reçoit près d'une vingtaine de plombs au niveau d'une épaule. Le 27 février, ce trentenaire, enfant du quartier des Tarterêts, affirme dans un témoignage vidéo au Parisien avoir participé à un système d'achat de votes en faveur de Serge Dassault et son successeur Jean-Pierre Bechter. Il lie la tentative d'assassinat à ce système. Une instruction est alors ouverte à Evry.

Le 19 février, Fatah Hou, ex-chef d'entreprise et boxeur, est très grièvement blessé de trois balles de calibre 38. Le suspect, Younès Bounouara, prend la fuite puis se rend après plusieurs mois de cavale. Ecroué depuis le 7 novembre 2013, cette figure locale est présentée comme un proche de Dassault. L'ancien maire UMP est en effet soupçonné d'avoir remis de l'argent à Younès Bounouara pour qu'il assure la paix sociale dans les quartiers, mais également pour qu'il contribue à son élection, puis celle de son successeur, Jean-Pierre Bechter. Dans le cadre de cette instruction ouverte à Evry, Serge Dassault a déjà été entendu comme témoin assisté en octobre 2013.

26.03 Dassault Bechter

# DES VOIX ACHETÉES ?

Ces deux homicides ont permis de mettre à jour une autre affaire : celle des achats présumés de votes à Corbeil-Essonnes. Après une enquête préliminaire, une information judiciaire a été ouverte à Paris en mars 2013 pour corruption, abus de biens sociaux, blanchiment et achat de votes présumés aux élections municipales, entre 2008 et 2010.

L'affaire a commencé avec des enveloppes d'argent liquide et des chèques qui avaient été distribués aux jeunes en échange de la promesse de leur vote. La "générosité", comme dit Serge Dassault, a fini par attirer l'attention de Tracfin, la cellule anti-blanchiment du ministère des Finances. Les juges ont ainsi retrouvé la trace d'une dizaine de chèques pour un montant total de trois millions d'euros. Ces sommes auraient été versées à deux intermédiaires, dont Younès Bounouara, sur des comptes à l'étranger, ouverts au nom de leurs proches.

Dans sa décision annulant l'élection municipale de 2008, le Conseil d'État avait tenu pour "établis" des dons d'argent aux électeurs, sans se prononcer sur leur ampleur. C'est pour ce dossier que les juges financiers ont demandé au bureau du Sénat de lever l'immunité parlementaire de Serge Dassault.

serge dassault

© Reuters

# ASSOCIATION DE MALFAITEURS ?

En janvier dernier, Fatah Hou a porté plainte auprès du parquet d'Evry, notamment pour association de malfaiteurs, une procédure qui vise Serge Dassault, son successeur à la mairie Jean-Pierre Bechter, un employé municipal et un diplomate marocain. Il les soupçonne d'avoir ourdi un stratagème pour le faire arrêter au Maroc et l'éloigner ainsi de Corbeil-Essonnes. Le parquet peut classer cette plainte, joindre les faits reprochés à une des enquêtes en cours à Evry, ou diligenter une enquête préliminaire avant d'éventuellement saisir des juges.

Une enquête préliminaire est également en cours au parquet de Paris pour extorsion en bande organisée, après des prêts accordés par Serge Dassault à des habitants de Corbeil-Essonnes. Cette enquête a été confiée à l'Office central de lutte contre le crime organisé (Oclo).

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