Il pourrait être libéré à cause de l'état de sa cellule

La maison d'arrêt de Bois-d'Arcy en 2008
La maison d'arrêt de Bois-d'Arcy en 2008 © MAXPPP
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C.B et Chloé Triomphe , modifié à
Une juge d'instruction a ordonné la remise en liberté d'un prisonnier de Bois-d'Arcy. Le procureur a fait appel.

La décision est rarissime. Une juge d'instruction du tribunal de grande instance de Versailles a ordonné cette semaine la remise en liberté d'un détenu en raison de ses conditions de détention indignes. La démarche de la juge n'a pas plu. Le procureur a immédiatement fait appel avec un référé détention, une procédure suspensive qui sera examinée vendredi.

Sur place pour un interrogatoire. C'est à la suite d'une visite à la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy pour un interrogatoire que la juge d'instruction a été interpellée par les conditions de détention du prisonnier qu'elle devait interroger. Ce dernier, un étudiant de 24 ans placé en détention provisoire depuis avril dernier dans le cadre d'une affaire de recel de vol et d'escroquerie, dénonçait en effet lui-même l'insalubrité de sa cellule. Me Stéphane Sebag, l'avocat du prisonnier, a assisté à la visite avec la juge d'instruction et confirme l'insalubrité du lieu. "Voir ce grand garçon qui fait 1m94 ne pas pouvoir se lever et accomplir toutes les choses de la vie quotidienne, c'est insupportable", estime-t-il au micro d'Europe 1. Le constat est effectivement éloquent : une cellule de 9 m² pour deux détenus, un trou dans le plafond avec la pluie et le vent qui passent, une table et une seule chaise pour manger. Une configuration qui empêche les détenus de se déplacer entre les deux lits, ce qui les contraint à passer l'essentiel de leur temps allongé.

"Au-dessus de son lit, mon client a un trou". "Entre les deux lits, il y a un espace de 50 cm², deux personnes ne peuvent pas passer en même temps. Au dessus de son lit, mon client a un trou. Donc il a le choix de se faire mouiller le visage quand il dort, ou alors les pieds. Pour manger, il y a une table, sur cette table, des réchauds que les détenus confectionnent eux-même. C'est très simple, dans cette cellule, c'est tellement exigu que l'on est obligé de rester allongé toute la journée", abonde l'avocat. Ce dernier salue d'ailleurs le caractère "rarissime" et "courageux" de la démarche de la juge d'instruction. Même si cette libération n'est pas encore actée.

Des conditions de vie dénoncées par le Contrôleur des prisons. En 2010 déjà, le Contrôleur général des prisons avait constaté lui-même l'état déplorable de certaines cellules, ainsi que les conséquences de la surpopulation. Dans les conclusions de son rapport de visite (un document consultable ici), transmis au ministère de la Justice en 2012, l'autorité administrative pointait l’insalubrité de certaines cellules, des "conditions de circulation extrêmement restreintes" et des "conditions de vie" qui "ne sont pas dignes et ne devraient pas perdurer". Christiane Taubira avait formulé ses observations en retour début mai dernier (un document consultable ici) . La Garde des Sceaux  précisait notamment qu'un schéma directeur de rénovation des bâtiments était actuellement à l'étude. La ministre notait que la surpopulation était avérée dans cet établissement carcéral "hébergeant en moyenne 720 personnes pour 520 places". Selon le dernier comptage en date du syndicat Ufap-Unsa-justice de Bois d’Arcy, les détenus hébergés  sont actuellement 800 pour 500 places disponibles. Un état de fait auquel Christiane Taubira jugeait difficile de répondre, dans la mesure ou ce phénomène s'applique également aux autres structures régionales.