Bouygues réclame 9 millions au Canard

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avec agences , modifié à
Le groupe de BTP assigne le journal en diffamation pour ses articles sur le "Pentagone français".

Bouygues Immobilier, géant du BTP, n’a pas apprécié d’être pointé du doigt dans des articles sur des faits de corruption présumés dans le chantier du futur "Pentagone français". Le groupe, qui a assigné Le Canard Enchaîné en diffamation, réclame 9 millions d’euros au journal. Une somme jugée "totalement délirante" par le rédacteur en chef adjoint de l’hebdomadaire satirique, Louis-Marie Horeau. "C'est du jamais-vu dans l'histoire du droit de la presse", a-t-il assuré sur Europe 1.

"C’est un épouvantail. L’idée des 9 millions est de dissuader le Canard et tous les médias qui nous ont repris, et de semer la terreur chez les confrères", estime-t-il. Le Canard enchaîné devrait être rapidement fixé sur son sort, puisque Bouygues a obtenu du tribunal de Paris de faire juger l’affaire en urgence. Elle sera plaidée dès le 18 janvier.

Le ministère se dit serein

Le 7 décembre, Le Canard enchaîné révélait qu’une information judiciaire pour corruption et trafic d’influence avait été ouverte en février pour examiner d’éventuelles malversations lors de l’attribution au géant Bouygues du chantier du futur "Pentagone" à la française, le nouveau siège du ministère de la Défense, dans le quartier Balard à Paris.

Un cadre dirigeant de Bouygues aurait, selon le journal, reçu le cahier des charges du marché avant ses concurrents grâce à un haut responsable du ministère de la Défense. Ces accusations ont  été qualifiées de "fausses" et de "gravement diffamatoires" par Martin Bouygues, le PDG du groupe.

Information "vérifiée plutôt trois fois qu'une"

Gérard Longuet, ministre de la Défense, a quant à lui affirmé début décembre que son ministère était "d’une sérénité totale" sur cette affaire. Le ministère a affirmé que la procédure d’attribution du chantier avait été conduite en toute "transparence" et "régularité".

Le Canard, lui, rétorque dans son édition de mercredi avoir "vérifié" l'information, "plutôt trois fois qu'une, et aux meilleures sources", et prévient qu'il a "quelques biscuits dans sa musette". Louis-Marie Horeau explique que le journal a reçu "le soutien tout à fait inattendu du procureur de la République de Paris".

Celui-ci aurait été contacté par un avocat de Bouygues qui lui aurait demandé de faire un communiqué "pour dire qu'il n'y a rien dans le dossier", a raconté Louis-Marie Horeau sur Europe 1. "Le procureur l'a envoyé sur les roses", mais cet avocat aurait tout de même affirmé que le procureur lui avait dit qu'il n'y avait rien dans le dossier. "Du coup, le procureur a fait un communiqué disant 'je n'ai jamais dit cela, c'est tout à fait faux'". "On a une preuve officielle qu'il y a bien un dossier, qu'il y a bien un soupçon", s'est donc félicité le journaliste, affirmant que Le Canard enchaîné n'est "pas vraiment terrorisé" par la menace de Bouygues.