Baby-Loup : la salariée voilée obtient gain de cause

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C.B avec Chloé Triomphe et AFP , modifié à
La Cour de cassation a donné raison à la salariée licenciée pour port du voile islamique.

Coup de théâtre dans "l'affaire" Baby-Loup. La Cour de cassation a annulé mardi le licenciement en 2008 d'une employée de la crèche privée Baby-Loup, dans les Yvelines, qui s'était vue reprocher par son employeur de refuser d'ôter son voile islamique.

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Le principe de laïcité pas retenu. En décembre 2008, la salariée, de retour d'un congé maternité suivi d'un congé parental, avait annoncé son intention de garder son foulard durant son travail. Ce qu'avait refusé la directrice de la structure, invoquant l'obligation de "neutralité philosophique, politique et confessionnelle" inscrite dans le règlement intérieur. "S'agissant d'une crèche privée", la plus haute juridiction judiciaire a estimé mardi que le licenciement de cette salariée constituait "une discrimination en raison des convictions religieuses" et devait être "déclaré nul".

La Cour de cassation a notamment jugé que le principe de laïcité ne pouvait être invoqué pour priver les "salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public" (...) "des protections que leur assurent les dispositions du code du travail".

Vers un troisième procès. "L'arrêt de la cour d'appel de Versailles qui avait déclaré le licenciement fondé est dès lors cassé", a précisé la Cour de cassation dans un communiqué. L'affaire sera donc rejugée devant la cour d'appel de Paris. Jusqu’ici, la justice s’est toujours prononcée en faveur de la crèche. L'ex-employée de cette crèche associative située dans un quartier sensible de Chanteloup-les-Vignes a en effet été déboutée à deux reprises par la justice.

Déboutée à deux reprises.En décembre 2010, la salariée, avait été déboutée une première fois par les prud'hommes qui avait validé son licenciement pour "faute grave" le 19 décembre 2008. Et à l'audience en appel de septembre 2011, le parquet général avait aussi pris position en faveur de la crèche, faisant valoir le "respect du principe de laïcité mais aussi la vulnérabilité des enfants".

"Une décision extrêmement décevante". Seule la Halde (la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité) saisie également par la salariée, avait d’abord apporté son soutien à cette dernière, en mars 2010. Avant de se rétracter en octobre de la même année, par la voix de son ex-présidente Jeannette Bougrab. Elle avait alors défendu la possibilité pour la crèche incriminée de choisir "l'option philosophique de la laïcité".

A l'annonce de la décision de la Cour de cassation, Jeannette Bougrab n'a pas caché sa déception. "C'est une décision extrêmement décevante, difficile, parce que Baby-Loup était un combat pour la laïcité et qu'en rendant une telle décision, la Cour de cassation vient de faire céder une digue, une digue qui était celle de la laïcité", a-t-elle déploré au micro d'Europe 1.  

"Une mise en cause de la laïcité". A l'époque, l'affaire avait créé une polémique nationale, mobilisant des défenseurs d'une stricte laïcité, de Manuel Valls, à l'époque député socialiste de l'Essonne, à la philosophe Elisabeth Badinter, marraine de la crèche. A l'annonce de la décision de la Cour de cassation, Manuel Valls a donc regretté mardi à l'Assemblée nationale l'annulation du licenciement de l'employée voilée y voyant une "mise en cause de la laïcité".

"En sortant quelques secondes de mes fonctions, je veux vous dire combien je regrette la décision de la Cour de cassation aujourd'hui sur la crèche Baby-Loup et sur cette mise en cause de la laïcité", a déclaré le ministre de l'Intérieur lors de la séance des questions au gouvernement.