La SDF "aurait pu accoucher en maternité"

Les accouchements dans la rue de femmes sans domicile fixe restent rarissimes
Les accouchements dans la rue de femmes sans domicile fixe restent rarissimes © MAXPPP
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avec Laure Dautriche et Walid Berrissoul , modifié à
ENQUETE - Le premier enfant de la SDF avait été placé parce qu’elle était alcoolique et toxicomane.

Elle vivait sous une tente depuis peu, dans le 14ème arrondissement de Paris. Au surlendemain de l'accouchement d'une SDF de 38 ans dans la rue et de la mort de son bébé, les associations tentent de comprendre comment elle a pu échapper à leur vigilance.

"Nous avons une traçabilité des appels. Elle nous avait appelés au Samu le 5 octobre et depuis plus de nouvelles", raconte sur Europe 1, Eric Molinié du Samu Social. "Elle avait un dossier à la maternité de Port Royal. Elle avait techniquement tous les moyens d'accoucher à Port Royal puisqu'elle était connue et référencée. Donc, elle aurait pu accoucher normalement", conclut il.

"Elle avait un dossier à la maternité" :

Mais cette grossesse n'était pas la première. Son premier enfant a été placé très tôt dans un foyer parce qu'à l'époque, cette quadragénaire était alcoolique et toxicomane. Elle avait même tenté de récupérer son fils en le kidnappant. Une scène qui a d'ailleurs inspiré l'une des scènes marquantes du film Polisse de Maïwenn sur la Brigade de protection des mineurs. C'est aussi, sans doute, ce qui a poussé la future mère a éviter l'hôpital ces dernières semaines.

Une grossesse dans la rue, un calvaire

Pourtant, mener une grossesse dans la rue est difficile. Outre les conditions météorologiques, le froid en hiver, la chaleur et la pollution en été, l'inconfort est permanent. Les SDF dorment sur des matelas usés et sous des tentes... De quoi transformer les neuf mois de grossesse de Maïté, SDF elle aussi, en calvaire. Elle a d'ailleurs fini par accoucher à l'hôpital.

"C'est plus qu'affreux parce que les gens vous bousculent que vous soyez enceinte ou pas ou même âgée", raconte Maïté. "On peut attraper des microbes pour se changer, pour le nettoyer, pour couper le cordon. Moi, je n'aurais pas su. Tu n'as pas de ciseaux. Pour ceux qui ne savent pas où aller, c'est très très dur", insiste la SDF.

"Les gens vous bousculent" :

Un phénomène isolé

Cependant, ces accouchements dans la rue restent rarissimes. Les femmes enceintes sont prioritaires sur les listes pour être hébergées en foyer d'accueil ou pour être soignées. Et, contrairement à certains SDF qui refusent toute assistance, elles demandent souvent à être aidées pendant leur grossesse.

"Elles sont prises en charge avant par l'assistance sociale de l'hôpital qui les suit", précise Rachid Benferat qui gère plusieurs centres d'accueil pour femmes SDF enceintes. "Elles savent quand elles doivent accoucher. Nos travailleurs sociaux s'entendent bien avec elles et ça se passe bien. Elles sont très assidues à ces rendez-vous. Elles y tiennent beaucoup, c'est un évènement. Surtout, à l'approche de l'accouchement, elles se préparent. On les prépare", conclut Rachid Benferat.

Qu'arrive-t-il après la délivrance ? Ces jeunes mères, sans domicile fixe, continuent d'être suivies pendant quelques jours. Puis, elles retrouvent la rue avec leur nouveau né. Dans le cas de cette femme qui a perdu son bébé, elle est toujours à l'hôpital. Son compagnon, lui, a obtenu mercredi un hébergement d'urgence.