Londres n’a pas assez surveillé ses banques

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En marge du scandale du Libour, les députés découvrent que le gendarme du secteur a été laxiste.

Icône du libéralisme politique et économique, le Royaume-Uni commence à s'inquiéter de la bonne tenue de son secteur bancaire. Enquêtant sur le scandale du Libor, la monarchie découvre avec stupeur que les gendarmes du secteur bancaire n’ont rien vu venir. A l'issue de ces travaux sur cette fraude massive, la commission des Finances de la Chambre des communes a délivré vendredi un réquisitoire sans appel.

Les banques accusées de manipulation

Avant de détailler la polémique outre-Manche, petit rappel des faits : le Libor, alias London interbank offered rate, désigne un taux interbancaire au rôle stratégique. Il s’agit du taux moyen auquel les banques se prêtent de l’argent entre elles. Calculé à partir des chiffres fournis par les principales banques, cet indicateur sert de base aux taux d’emprunt accordé à n’importe quel consommateur, qu’il emprunte pour acheter une maison ou encore une voiture.

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 Le Libor, et son homologue uniquement européen dénommé Euribor, a donc une importance stratégique. Lorsque le Libor monte, les banques font payer plus cher leurs prêts et inversement. Avec l’éclatement de la crise, les banques sont accusées d’avoir faussé ce chiffre pour maintenir des taux d’intérêt élevé et donc leurs marges. Pire, pour réussir à manipuler le Libor, ces banques ont forcément dû s’entendre entre elles. La banque britannique Barclays, ainsi qu’une petite dizaine d'autres établissements dont le Crédit Agricole et la Société générale, est sur le banc des accusés et elle a déjà reconnu qu’elle allait payer une amende de 370 millions d’euros.

Le gendarme du secteur bancaire sur la sellette

Au fur et à mesure que les banques acceptent de collaborer pour éviter de trop grandes sanctions, les élus britanniques découvrent que les autorités de surveillance n’ont rien vu venir. "La manipulation n'a été décelée ni par la FSA (l'Autorité des marchés financiers, ndlr), ni par la Banque d'Angleterre. Cela ne va pas", a dénoncé le conservateur Andrew Tyrie, président de la commission des Finances.

"Les preuves montrent que la Banque d’Angleterre était consciente que les banques puissent être tentées d’agir de manière malhonnête, mais elle n’a jamais envisagé que de telles infractions soient commises. Elle n’a même pas demandé à la FSA de vérifier si c’est le cas", précise le rapport parlementaire, avant de conclure : "avec le recul, cela fait penser que la Banque d’Angleterre a été bien naïve".

"Des améliorations urgentes dans la façon dont sont dirigées les banques et dont elles sont réglementées est nécessaire si l'on veut restaurer la confiance du marché et de la population", a-t-il ajouté, avant de lister plusieurs pistes : augmenter les amendes, revoir les failles du droit pénal dont profitent les banques et revoir le fonctionnement des régulateurs du secteur.

Fautif, Barclay’s se défend néanmoins

Bob Diamond, l'ancien directeur général de Barclays emporté en juillet par le scandale, mène lui un tout autre combat : minimiser la fraude et réhabiliter l’image de son ancien employeur. "Je ne suis pas d'accord sur les attaques concernant la culture de Barclays et sa réputation", s’est-il insurgé lundi.

"Le comportement d'un petit groupe de traders sur la manipulation du Libor a été répréhensible et ne correspond pas aux critères élevés de Barclays", a ajouté Bob Diamond, avant de souligner que la banque est "l'une des quelques grandes institutions financières britanniques à n'avoir pas dû demander de l'aide au gouvernement" pendant la crise.