Du porc à la salmonelle, pas vraiment une surprise

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et Pascal Berthelot , modifié à
L’affaire des 1.500 tonnes de porc contaminé à la salmonelle met en lumière les limites de l’autocontrôle des industriels.

L’info. Le groupe coopératif breton Cooperl est soupçonné d’avoir commercialisé près de 1.500 tonnes de viande de porc contaminée aux salmonelles entre 2010 et 2012. S'il est avéré, l’ampleur du scandale serait surprenante de la part du numéro 1 du porc en France. Mais il est malheureusement prévisible : cette fraude potentielle a probablement été rendue possible par l’autocontrôle sur la qualité de la viande, dont les résultats sont soupçonnés d’avoir été maquillés.

Un risque prévisible. Place forte de l’industrie agroalimentaire, la France se doit de contrôler la qualité des aliments produits sur son territoire. Sauf qu’elle ne cesse de réduire les moyens alloués à la direction générale de l’alimentation : le nombre de fonctionnaires chargés des contrôles a été réduit d’environ 14% entre 2007 et 2012.

Didier Migaud, Cour des Comptes, recherche

Une réduction "drastique" des effectifs que la Cour des comptes a fustigée dans son dernier rapport, publié début février. Dénonçant des "anomalies graves", les Sages estimaient que les contrôles des 506.000 établissements concernés "sont peu nombreux et les non-conformités rarement sanctionnées".  Et ces derniers d’avancer plusieurs chiffres : les contrôles ont baissé de 17% entre 2009 et 2012 et "7% de ces établissements n'ont pas fait l'objet d'un contrôle entre 2009 et 2012".

Les entreprises face à elles-mêmes. Incapable de mener lui-même suffisamment de contrôles, l’Etat a donc décidé d'en transférer la charge aux entreprises elles-mêmes, qui, en plus du coût financier que cela représente, peuvent être tentées de ne pas être trop regardantes avec ces contrôles. C’est en vertu de cet autocontrôle que Cooperl aurait dû identifier un taux de salmonelle dépassant la limite autorisée dans les 1.500 tonnes de viande qu’il a vendues en France et en Russie. Intention volontaire ou simple maladresse ? Toujours est-il que la justice a ouvert une enquête.

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Ce que répond Cooperl. Pour sa défense, le groupe coopératif breton La Cooperl plaide "une mauvaise interprétation" de la réglementation. A ses yeux, la réglementation est trop complexe et ne cesse de changer, ce qui expliquerait des contrôles défaillants. Une réponse un brin inquiétante lorsqu’on sait qu’elle émane du leader français du secteur.

Cooperl assure "qu’immédiatement après le contrôle de novembre 2012, nous avons amélioré nos protocoles d'analyse sur la salmonelle et nous sommes en parfaite conformité avec les exigences règlementaires de qualité et de sécurité sanitaire."

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Au fait, de quelle viande parlons-nous ? Les 1.500 tonnes identifiées font partie de ce qu’on appelle la viande mécaniquement séparée (VMS), l’équivalent porcin du minerai de boeuf. Il s’agit des restes qui n’ont pas été enlevés par les abattoirs : les carcasses sont passées dans un appareil à haute pression qui sépare les os de ces résidus de viandes, ensuite transformés en pâte. Une pâte qu’on retrouve généralement dans les préparations alimentaires les moins chères, notamment les saucisses cocktails.

Quels sont les dangers de la salmonelle ? La salmonelle est une bactérie qui infecte le tube digestif des vertébrés. Elle provoque donc des infections alimentaires qui peuvent se révéler dangereuses lorsqu'elles touchent les enfants en bas âge. Une viande contaminée à la salmonelle peut néanmoins être vendue sous contrôle, et à condition qu'elle soit signalée comme telle, afin que la bactérie soit éliminée de façon appropriée à la cuisson.

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