Comment fonctionnent les agences de notation ?

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Outil indispensable de l’information financière, les agences ont un immense pouvoir et peu de contraintes.

Standard & Poor's, Moody's et Fitch. Trois des principales agences de notation, dont les noms occupent une place de choix dans l'actualité depuis les récentes mésaventures économique de la Grèce, du Portugal et maintenant des Etats-Unis. Acteur incontournables de la finance, ces agences qui font la pluie et le beau temps sur les marchés sont néanmoins l’objet de vives critiques, accusées d'être trop conciliantes avec leurs clients et de précipiter les pays dans la tourmente.

Les agences sont donc au cœur du système financier. Chargées d'évaluer la solidité financière d'un Etat ou d'une entreprise, elles fournissent des informations détaillées aux investisseurs. Mais comment travaillent-elles et pourquoi sont-elles critiquées ?

Comment fonctionnent-elles ?

Les sigles "BBB+" ou "AA" sont des notes attribués aux Etats ou aux entreprises étudiés. La note AAA+ est la meilleure et signifie que l’entreprise remboursera son emprunt en temps et en heure, tandis que D est la pire, synonyme de quasi-faillite.

Lorsqu’une agence de notation abaisse la note attribuée à une entreprise ou un État, la réaction des bourses est immédiate : de nombreux investisseurs cherchent à vendre les actions de cette entreprise, contribuant ainsi à la baisse de l’action boursière. A l’inverse, une bonne note dope le cours de l’action.

Dans le cas des pays, les conséquences sont bien plus graves, comme en Grèce. Une mauvaise note désigne un pays pouvant avoir du mal à rembourser ses prêts. Résultat, les taux d'intérêts grimpent et enfoncent encore un peu plus ces pays dans la crise : c'est ainsi que les Européens ont dû voler au secours des Grecs et emprunter à leur place pour leur éviter la banqueroute.

Pourquoi sont-elles critiquées ?

Payé par les organismes notés. Les agences de notation travaillent à la demande des entreprises qui souhaitent être notées, souvent pour montrer leur bonne santé financière et ainsi attirer de nouveaux investisseurs. C’est donc le client qui paye l’observateur, ce qui n’est pas une garantie d’objectivité. C'est ainsi qu'elles n'ont pas du tout prévu le scandale d'Enron en décembre 2001 alors qu'une étude rigoureuse de ses comptes aurait permis d'anticiper la faillite à venir.

Pas infaillibles. Pour une agence de notation, la crédibilité est le meilleur atout. Pourtant, malgré le scandale Enron et la menace d'une loi encadrant leur travail, les agences de notation ont pu continuer de travailler comme avant. Or elles n'ont pas vu venir la crise des subprimes, une erreur qui n'a pas pour autant mis les agences de notation sur la sellette.

En situation d'oligopole. Bien que devenues incontournables dans le domaine financier, les agences de notation se comptent sur les doigts de la main et dispose donc d'une très grande influence. Mais, faute de concurrence, elles n'ont pas été sanctionnées pour leurs erreurs passées.

Les agences bientôt bousculées ?

Après l'affaire Enron, les dirigeants américains avaient menacé de réglementer le secteur et les pratiques des agences, une menace jamais mis à exécution. Lorsqu'éclate la crise des subprimes, elles sont de nouveau critiquées pour ne rien avoir vu. Les agences ont argumenté que ces outils financiers étaient trop complexe pour permettre la moindre lisibilité.

Les dirigeants des principales puissances économiques ont à nouveau évoqué une réglementation de ce secteur, une réforme toujours dans les cartons. Mais les sévères notes attribuées à la Grèce puis au Portugal, y compris juste après l’annonce de plan d'aide, a fini d'irriter les Européens. Ces derniers envisagent donc de plus en plus ouvertement la création d'une agence non-américaine.

Un virage déjà opéré par la Chine, qui a favorisé la création en 1994 de l'agence Dagong. Cette dernière délivre d'ailleurs des analyses bien différentes de ses confrères américaines. Même les Etats-Unis commencent à se montrer critiques, après la perte du sacro-saint AAA : le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, a estimé le 7 août que l'agence de notation Standard and Poor's a "émis un jugement terriblement mal avisé".