De père en fille : Le chemin de l’identité

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Esther Leneman , modifié à
La fille de son père d'Anne Berest est le Livre Europe 1 de février. Notre classique : La place d’Annie Ernaux

Chaque mois, un jury de dix auditeurs d’Europe 1 choisit le livre du mois parmi cinq nouveautés proposées par la rédaction. En écho au « livre du mois », Europe 1 vous propose un "classique".

La fille de son père Anne Berest (éditions du Seuil)

Il y a toujours une pointe d’autobiographie dans un roman, surtout s’il s’agit du premier. Mais Anne Berest précise d’emblée : La fille de son père est "l’histoire d’une famille que j’ai inventée". Reste donc à chercher les traces de l’auteur dans ses personnages.

Trois sœurs, que la vie a éloignées, se retrouvent chez leur père à l’occasion de l’anniversaire de l’aînée. Dans la maison de leur enfance, les souvenirs affleurent – tous hantés par l’image idéalisée d’une mère morte à 38 ans. Difficile pour Catherine, la nouvelle compagne du père, de se faire sa place. A la table d’anniversaire, les gestes deviennent nerveux et les paroles dérapent. Excédée par l’hostilité des trois sœurs, Catherine finit par exploser. Au dessert, elle révèle un secret de famille : la mère avait un amant et l’une des trois filles n’est pas la fille du père.

Vrai ou faux ? Et si c’est la vérité, de laquelle s’agit-il : Irène, l’aînée ; Charlie, la cadette ou la narratrice, dont on ne connaîtra jamais le prénom ?

Ce sont les libraires qui, les premiers, ont repéré ce roman. La fille de son père a été sélectionné pour le prix Goncourt et le prix de Flore. Il fait partie de la sélection du Prix du roman de France Télévisions.

Ce mois-ci, notre jury était très partagé. Le thème choisi par Anne Berest et son style l’ont finalement emporté. "Ce livre est à la fois une belle et complexe histoire d’amour entre un père et ses trois filles et une réflexion sur la parentalité… Les dialogues sont, par moments, jubilatoires…" écrit Valérie, membre du jury Europe 1.

L’auteure : Anne Berest est née en 1979 à Paris. Après des études littéraires, elle devient la rédactrice en chef des Carnets du Rond-Point, publication du Théâtre du Rond-Point. Elle participe, en 2008, avec Edouard Baer, à l'adaptation pour le théâtre et à la mise en scène du texte Un Pedigree de Patrick Modiano. (Pour la petite histoire : son père était chercheur en mécanique des roches ; sa mère linguiste, spécialisée dans les langues bantoues).

Photo d'Anne Berest

La place d’Annie Ernaux (Folio)

Pour qualifier son roman La place, paru en 1983 chez Gallimard, Annie Ernaux a inventé un mot : l’auto-socio-biographie.

Récit de la mort d’un père, Laplace combine le décryptage d’une ascension sociale en trois générations et celui d’un amour douloureux entre ce père et sa fille – le tout dans un style délibérément sobre et distant.

Comme l’auteure, la narratrice est devenue professeur de lettres au lycée. Comme l’auteure, elle est la première de sa famille à avoir fait des études. Son grand-père, paysan sans terre, était charretier. Son père, lui, avait été à l’école, jusqu’au certificat d’études… avant d’être placé, à 12 ans, comme vacher dans une ferme. Le service militaire et quelques années d’usine plus tard, il avait réussi à acheter un bistrot dans une petite ville normande.
C’est dans ce café que la narratrice a grandi. Là qu’elle a préparé ses premiers examens, là qu’elle a commencé à creuser le fossé culturel qui allait la séparer de ses origines.

Photo d'Annie Ernaux

L’auteure : Née en Normandie en 1940, Annie Ernaux sera longtemps enseignante : institutrice, professeure puis agrégée de lettres modernes. Prix Renaudot 1984, La place est son 4ème roman. En 2008, son dernier roman en date, Les années a été doublement récompensé, par le Prix Marguerite Duras et le Prix François Mauriac.