787 : le Dreamliner tourne au cauchemar

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Thomas Morel , modifié à
ZOOM - L'avion développé par Boeing souffre depuis sa conception de problèmes techniques.

Le contexte. Série noire pour Boeing. Le constructeur américain connaît depuis deux semaines une série d'avaries sur ses 787 "Dreamliner" qui ont contraint les compagnies aériennes japonaises, qui exploitent la moitié des appareils en circulation, à les clouer au sol. Soucis de frein, pare-brise fêlé, fuites de carburant et problèmes de batteries, rien n'a été épargné. A tel point que, si la plupart des clients de Boeing n'ont pas renoncé à leurs 787, les autorités de sécurité aérienne en Inde, aux Etats-Unis et au Japon ont annoncé des inspections de sécurité.

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C'est une très mauvaise nouvelle pour Boeing. L'appareil, présenté en trois versions, le 787-3 (moyen-courrier de 290 à 330 places), le 787-8 (long-courrier de 210 à 250 sièges), et le 787-9 (long-courrier de 250 à 290 passagers), est censé être le fer de lance de l'industriel dans la conquête du marché aéronautique mondial.

Un défi industriel. Si le 787 rencontre autant de problèmes, c'est en grande partie car sa fabrication a obligé son constructeur à relever de grands défis. Pour développer l'appareil, Boeing a eu recours aux dernières technologies afin d'en alléger le poids et de réduire sa consommation de carburant. C'est ainsi que beaucoup de pièces développées en aluminium sur d'autres appareils sont ici fabriquées en fibre de carbone, ce qui permet d'alléger significativement le poids de l'appareil, et donc de diminuer les besoins en kérosène.

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De même, les systèmes hydrauliques ont été remplacés par de l'électrique, comme l'explique Bernard Chabbert, consultant aéronautique, au micro d'Europe 1 : "on a décidé d'en faire un avion totalement électrique. La pressurisation est gérée électriquement, le freinage est électrique, le dégivrage aussi, etc. C'est une véritable usine électrique à lui tout seul. Forcément quand on ajoute beaucoup de problèmes électriques potentiels à l'intérieur d'un avion, on fini par avoir des soucis."

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100.000 modifications. Mais ces défis techniques ont entraîné de nombreux retards. Le 787, qui devait prendre son envol en 2008, n'a pu être commercialisé qu'en 2011. Pour certains ingénieurs de chez Boeing, cités par le Seattle Times, le développement était comparé à un "enfer industriel". Entre la fabrication des six appareils de texte et celle des vingt premiers modèles, plus de 100.000 retouches ont ainsi dû être apportées.

La prépondérance de l'électricité entraînait la formation d'arcs électriques entre les circuits. Les fibres de carbone ont, quant à elles, engendré une forte condensation dans la cabine, avec à la clé de la "pluie" dans l'appareil. Lors d'un vol de test, un incendie s'est même déclenché en présence des inspecteurs de la FAA, l'agence américaine de l'aviation.

800 commandes. Depuis sa mise en service, pourtant, Boeing semblait avoir tourné la page des difficultés. Jusqu'à la semaine dernière, aucun incident grave n'avait été à déplorer. Les problèmes révélés ces derniers jours vont obliger le constructeur à trouver une solution rapidement, sous peine de voir son succès technologique se transformer en désastre commercial. 800 commandes de 787 ont en effet déjà été passées, qui doivent permettre à Boeing de reprendre la tête du marché aéronautique mondial face à son rival européen Airbus.